Les leçons du professeur BlackBerry

Les entreprises qui veulent éviter de subir le même sort que BlackBerry feraient mieux d'apprendre de ses erreurs.

Quelles leçons les entreprises du monde de la technologie doivent-elles tirer du sort de BlackBerry, qui espère sauver sa peau en annonçant des milliers de mises à pied et en acceptant une offre d’achat d’une firme de capital de Toronto qui pourrait bien avoir envie de la revendre en pièces détachées?

L’avenir de BlackBerry ressemblera-t-il à celui de Sega, qui s’est réinventé, tant bien que mal, en «simple» éditeur de jeux vidéo après quelques échecs retentissants comme équipementier? Ou bien la compagnie suivra-t-elle plutôt Nortel Networks jusque dans les oubliettes de l’univers techno? Impossible de le savoir. Mais les dirigeants d’entreprises qui veulent éviter le chemin de croix que BlackBerry endure ces temps-ci feraient mieux d’apprendre de ses erreurs.

Éventuellement, la PlayBook est devenue un produit tout à fait correct, mais le mal était fait. Elle a coûté 1,5 milliard à BlackBerry et n’a jamais rapporté plus que 2% des revenus de la compagnie. Six mois après son lancement, on la balayait sous le tapis.

Leçon #1 : Quoi que vous fassiez, ne perdez pas votre clientèle essentielle.

À quoi pensez-vous quand on vous parle d’un «client parfait pour BlackBerry»? Probablement à un(e) professionnel(le) ou cadre d’entreprise, toujours pressé(e), qui porte 2 000$ de vêtements rien que pour aller au gym et qui a besoin d’être au courant de tout ce qui se passe au bureau et à la Bourse même pendant des vacances à Aruba.

Cette clientèle exige de la fiabilité et de la sécurité. Pendant longtemps, personne d’autre ne pouvait égaler BlackBerry dans ces domaines. Puis, au moment où iOS et Android ont commencé à offrir des produits acceptables aux yeux des très frileux départements de soutien technique des grandes entreprises, le service de BlackBerry est tombé en panne sur des continents entiers pendant 3 jours en octobre 2011. Pour bien des gens d’affaires qui lorgnaient déjà du côté de la compétition parce que les iPhone et les Android étaient beaucoup plus polyvalents que leurs vieux BlackBerry, cet incident a probablement été la goutte qui a fait déborder le vase.

Leçon #2 : La direction bicéphale, c’est NON!

Avez-vous déjà rencontré un PDG? Moi, j’en ai connu quelques-uns. En général, disons que ce sont des gens qui ont des idées bien arrêtées. Les meilleurs consultent, les pires ordonnent, mais dans tous les cas, ils décident. Et quand on ne fait pas exactement ce qu’ils veulent, ça va mal.

Maintenant, prenez deux de ces types, mettez-les dans le même bureau, et dites-leur de diriger la compagnie ensemble. C’est ce que BlackBerry a fait en 2012, alors que la compagnie était déjà sur le déclin. La recette n’avait pas très bien fonctionné pour Nortel; ça n’a pas été mieux pour BlackBerry.

Leçon #3 : Si vous attaquez un nouveau marché, ne le faites pas à moitié.

Vous vous souvenez de la PlayBook? Une tablette qui tentait de concurrencer l’iPad, mais qui n’offrait pas de service de courriel ni de calendrier si elle n’était pas jumelée à un téléphone intelligent BlackBerry et qui coûtait plus cher qu’un iPad?

Éventuellement, la PlayBook est devenue un produit tout à fait correct, mais le mal était fait. Selon The Guardian, la PlayBook a coûté 1,5 milliard à BlackBerry et n’a jamais rapporté plus que 2% des revenus de la compagnie. Six mois après son lancement, on la balayait sous le tapis.

Leçon #4 : Trop peu, trop tard, c’est parfois trop peu et trop tard.

Entre le moment où BlackBerry a acheté QNX pour en faire BlackBerry OS version 10 et le moment où le premier téléphone doté de ce système est apparu sur le marché, il s’est écoulé presque trois ans. Trois ans! Et si le produit final n’était pas mal du tout, il ne pouvait pas faire mieux que rattraper une partie du retard accumulé par rapport à iOS, à Android et même à Windows Phone.

Résultat : quelques millions d’appareils Q10 et Z10 vendus au premier trimestre de l’année financière et une dégringolade complète au deuxième. Aux yeux du grand public, l’écosystème BlackBerry ne fait pas le poids.

Et l’avenir, maintenant?

Si le processus de vérification diligente se passe bien et que l’acquisition de BlackBerry par Fairfax Financial Holdings se concrétise, il y a de l’espoir :

  • Réduire l’offre d’appareils destinés au grand public pour se concentrer sur le haut de gamme et sur les entreprises, comme la direction l’a annoncé la semaine dernière, est une bonne idée : après tout, il y a encore bien des gens d’affaires qui ont le logo de BlackBerry tatoué sur le coeur.
     
  • Offrir BBM sur les autres systèmes, ça aussi, c’est une excellente idée puisque c’est le service qui a fait la réputation de la compagnie : bien des gens qui n’ont pas du tout envie d’abandonner leurs téléphones actuels ne demanderaient pas mieux que de retourner à Messenger pour leurs communications d’affaires.
     
  • Et ce genre de stratégie n’aurait pas été annoncée en public quelques jours avant la transaction sans que les gens de Fairfax n’aient accordé leur bénédiction.
     

Ceci dit, avec une part du marché mondial sous les 3%, BlackBerry n’a plus droit au bénéfice du doute, et les firmes de capital ne sont pas réputées pour avoir beaucoup de patience. Les prochains mois pourraient être au moins aussi explosifs que les derniers.

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