Le brevet sur la baladodiffusion enfin invalidé

Allez et podcastez en paix : le troll auquel le United States Patent and Trademark Office avait inexplicablement accordé un droit exclusif sur la baladodiffusion, malgré des tonnes de preuves qu’il n’avait rien inventé du tout, ne pourra plus jamais venir vous croquer les orteils.

Il était une fois un charmant personnage du nom de Jim Logan qui ne manquait pas de culot. À la fin des années 1990, Logan et sa compagnie Personal Audio LLC ont tenté de mettre sur le marché un lecteur de musique numérique portatif. Le fait que vous n’avez probablement jamais entendu parler de Personal Audio avant aujourd’hui vous indique assez bien le niveau de succès que le produit a connu.

Que fait-on lorsqu’on possède un brevet, mais qu’on n’a ni le talent, ni les ressources pour en tirer quoi que ce soit d’utile? On poursuit tout ce qui bouge!

Mais pendant qu’il perdait sa chemise et qu’il regardait Apple vendre 11 000 milliards d’iPod, Logan a pris le temps d’enregistrer un brevet qui allait devenir tristement célèbre.

Comment faire des sous sans rien faire d’autre

Le brevet en question décrivait une méthode pour diffuser du contenu épisodique en ligne, sous forme de séries. Autrement dit, tout ce qui ressemble de près ou de loin à de la baladodiffusion, en audio ou en vidéo.

Et que fait-on, aux États-Unis, lorsqu’on possède un brevet mais qu’on n’a ni le talent, ni les ressources pour en tirer quoi que ce soit d’utile? On poursuit tout ce qui bouge!

Personal Audio s’est donc mis à harceler baladodiffuseurs, chaînes de télévision et autres producteurs de contenu. En septembre dernier, un jury du Texas lui a même accordé 1,3 millions de dollars US dans une cause impliquant le tout-puissant réseau CBS.

Il est bon ton ici de vous recommandez l'excellent documentaire Rise of the Patent Troll.
Il est bon ton ici de vous recommandez l’excellent documentaire Rise of the Patent Troll.

Seul problème : la diffusion de contenu épisodique en ligne existait bien avant que Personal Audio ne dépose sa demande de brevets. Et grâce à la Electronic Frontier Foundation et à une campagne de sociofinancement bien menée, il a été possible de le démontrer d’une manière si évidente que même le USPTO a finalement été forcé de comprendre le bon sens. Il n’y a donc plus de brevet sur la baladodiffusion. Hourra!

Un cas isolé parmi des millions d’autres cas isolés identiques

Voilà donc une histoire qui finit bien. Mais pour en arriver là, il a fallu que la EFF s’en mêle et qu’une quantité effarante de ressources soit gaspillée pour démontrer une évidence.

Or, le cas de Personal Audio est loin d’être unique. À un moment ou à un autre, le USPTO a accordé des brevets ridicules sur les concours en ligne, sur les applications qui donnent des indications routières par GPS, et même sur les bâtons pour jouer avec son chien. Toutes des «inventions» qui existaient depuis longtemps – surtout dans le cas du bâton, qui doit bien remonter à l’époque où les ancêtres de l’homme moderne et leurs chiens ont poussé les Néandertaliens jusqu’à l’extinction.

Et on ne parle même pas des idioties comme ce brevet accordé à un mélange de restants de table qui guérit supposément le cancer et qui pourrait permettre à son détenteur de poursuivre tous ceux qui développeront de vrais médicaments contre le cancer jusqu’à la fin des temps. Ou comme ce brevet sur la diffusion de contenu interactif sur Internet, rien que ça, qui a mené à un procès lors duquel Tim Berners-Lee, l’inventeur du Web, a dû témoigner pour la défense.

Comment breveter ce que tout le monde fait déjà

Comment est-il possible qu’autant de brevets ridicules soient accordés? Voici quelques pistes de réflexion :

Est-ce que ce genre de bêtises explique tout? Probablement pas, mais j’espère que oui.

  • Les entreprises ont tout intérêt à multiplier les demandes de brevets «défensifs» pour se construire elles-mêmes un bouclier contre les poursuites.
  • Submergés, les employés du bureau des brevets n’ont donc pas le temps d’enquêter très longtemps sur chaque demande.
  • Les employés du bureau des brevets ne sont pas tous des Einstein (même si c’est pendant qu’il travaillait au bureau suisse des brevets qu’Einstein a écrit certains de ses articles scientifiques les plus célèbres).
  • Plus un brevet est écrit dans un jargon incompréhensible, plus il y a de chances que le pauvre inspecteur finisse par l’accorder rien que pour se prémunir contre la migraine.
  • Une part non négligeable de la masse du Système Solaire est composée d’avocats spécialisés dans la rédaction de brevets écrits dans un jargon incompréhensible.
  • En 2012, on apprenait que les inspecteurs du Bureau américain n’avaient apparemment pas le droit de se connecter à Internet sur les heures de travail à la fin des années 1990. C’est sûr qu’il est difficile de savoir ce qui existe déjàsur Internet dans un cas semblable.

Est-ce que ce genre de bêtises explique tout? Probablement pas, mais j’espère que oui.

Parce que sinon, il faudra conclure que quelqu’un, quelque part le fait exprès – et donc que l’institution qui devrait théoriquement nous protéger contre les trolls constitue elle-même le pire troll au monde.

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