Si Far Cry 3 avait causé toute une surprise en 2012, on ne peut pas dire que la série ait particulièrement rayonné par son originalité depuis. En fait, même si les derniers Far Cry n’étaient pas mauvais, ils offraient des expériences remâchées qui, dans Far Cry 5, se sont également transformées en une parodie aussi répétitive qu’étrange. Ubisoft Montréal ayant bénéficié de l’appui d’Ubisoft Toronto dans le développement de Far Cry 6, ce dernier parvient-il à s’élever par rapport à ses prédécesseurs ? Disons que le verdict est plus compliqué qu’il n’y paraît.
- Disponible sur: Xbox Series S/X, PlayStation 5, PlayStation 4, Xbox One, PC, Google Stadia, Amazon Luna
- Prix: 79,99$ + txs
Nouveau dictateur, nouveaux rebelles
Far Cry 6 vous plonge dans la peau de Dani Rojas, que vous pouvez incarner en tant qu’homme ou femme. Contrairement aux derniers jeux de la franchise, votre personnage évoluera avec le scénario puisqu’il interagira avec les habitants de l’archipel fictif de Yara tout en étant bien visible lors des cinématiques. Votre objectif sera de reprendre Yara des mains du dangereux dictateur Anton Castillo, un homme lui-même fils d’un dictateur impitoyable. En effet, si Castillo a promis le paradis à ses concitoyens grâce au développement d’une cure miracle appelée Viviro, il a volontairement omis de leur mentionner que cela se fera au prix de nombreuses vies.
Le phénomène sectaire de Far Cry 5 fait donc place aux questions politiques et idéologiques dans Far Cry 6. Fortement inspiré des décors et de l’histoire de Cuba, le jeu vous amènera à prendre les armes et à affronter le régime Castillo afin de libérer l’île avec l’aide des rebelles. En revanche, même si le scénario est mieux écrit que celui des deux derniers opus, Ubisoft n’a toujours pas trouvé la recette afin de créer un ennemi principal aussi poignant que Vaas l’était dans Far Cry 3. Même si la performance de Giancarlo Esposito est irréprochable, le développement du personnage ne rend pas justice à l’acteur tant il finit par occuper une place secondaire dans l’histoire du jeu.
Attendez-vous donc à retrouver un scénario politique plus étoffé et mieux construit que l’histoire des derniers Far Cry, mais sans qu’Ubisoft soit parvenue à approfondir suffisamment ses personnages pour les rendre aussi intéressants que ceux de Far Cry 3.
Une recette éprouvée
Pourquoi briser une recette gagnante ? Après tout, malgré tous les reproches adressés envers Far Cry 4 et Far Cry 5, ces derniers ont connu un succès commercial. Le développement de jeux d’envergure étant devenu très dispendieux, pourquoi prendre le risque de modifier une formule gagnante ?
C’est pourquoi Far Cry 6 s’inspire fortement de la recette à succès des jeux à monde ouvert d’Ubisoft. Plutôt que de reconstruire les fondements de la franchise, Ubisoft a joué de prudence en offrant une fois de plus un immense monde ouvert dans lequel vous devrez compléter une pléthore de missions et d’activités afin de libérer Yara.
Ainsi, non seulement terminerez-vous des missions principales et secondaires pour le compte des rebelles, mais vous aurez aussi l’occasion d’être impliqué dans une variété d’activités comprenant notamment des courses à relais, la libération de postes appartenant aux Castillo, la résolution de casse-tête semblables aux quêtes de trésors de Far Cry 5, la découverte de coffres de butins un peu partout sur l’archipel et même la participation à des combats de coqs ! Terminer le jeu pourrait vous prendre de 40 à 50 heures, mais tout compléter pourrait facilement faire grimper votre compteur d’heures à plus de 80, voire 100 heures de jeu.
Ceci dit, si le tout s’avère plutôt classique, l’expérience globale est beaucoup plus diversifiée et intéressante que celle de Far Cry 5. Dans ce dernier, chaque région était un copier-coller de la précédente et était entrecoupée de séquences contre la famille Seed auxquelles on ne pouvait échapper. Far Cry 6 propose plus de variété et nous permet de libérer Yara à notre rythme sans que celui-ci soit cassé par des séquences automatiques nous confrontant aux principaux adversaires du jeu.
Une progression armée
Je dois vous avouer que même si j’ai investi des dizaines d’heures dans Far Cry 5, son système de progression m’a irrité. En fait, je n’avais aucun sentiment de progression tout simplement parce que j’ai utilisé les mêmes armes et les mêmes gadgets de la première à la dernière région du jeu.
Far Cry 6 modifie ce système en basant notre progression sur notre équipement. Ainsi, plus vous progresserez dans le jeu, plus vous trouverez des pièces d’équipement ainsi que des armes de haut niveau. Ces dernières pourront aussi être améliorées à l’aide de pièces nécessitant certaines ressources que vous trouverez. De ce fait, la découverte d’armes est bien plus intéressante, d’autant plus que le jeu propose des armes uniques qui permettront de faire beaucoup de dommages !
Autre élément intéressant: Far Cry 6 revient aux sources de la série en nous permettant d’aborder ses situations comme on le désire. En fait, vous pourrez modifier votre équipement en fonction du style de jeu que vous privilégierez. Vous êtes plus du genre furtif ? Alors, des armes silencieuses et un équipement permettant de vous repérer moins facilement seront de mise. Vous préférez tout faire exploser ? Un lance-grenades, un fusil à pompes et des vêtements qui vous procureront une meilleure défense seront alors des choix à considérer. De ce fait, cela permet de personnaliser notre équipement en fonction de notre style sans qu’on ne soit poussé à adopter une approche plutôt qu’une autre.
Par ailleurs, Far Cry 6 est une expérience plus intelligente par rapport aux deux derniers Far Cry en ce sens qu’il encourage davantage le repérage. Les forces de Castillo ont des points faibles que vous pourrez visionner en les observant de loin. Contrairement à Far Cry 5 où tous les ennemis se ressemblaient, vous devrez désormais composer avec des soldats plus vulnérables à différentes sortes de balles. Vous serez donc invité à modifier votre équipement en fonction des situations auxquelles vous ferez face, mettant ainsi la table à un jeu plus tactique, plaisant et satisfaisant que les opus des dernières années.
D’autre part, vous pouvez dire adieu aux combats ininterrompus de Far Cry 5. Désormais, vous aurez la possibilité de ranger vos armes et même de soudoyer des soldats pour éviter des confrontations. Ça peut paraître anodin, mais cela supprime l’un des principaux irritants de Far Cry 5. En effet, je n’en pouvais plus d’être attaqué à vue par les forces des Seed alors que je voulais simplement avancer et explorer. Far Cry 6 m’a épargné ces désagréments.
Problèmes du présent et du passé
Si Far Cry 6 est définitivement meilleur que Far Cry 4 et Far Cry 5, il n’en demeure pas moins qu’il comporte son lot d’irritants. En fait, plusieurs problèmes de la série Far Cry sont de retour, ce qui est étrange considérant qu’Ubisoft aurait pu les corriger depuis le dernier volet.
En outre, bien que le nombre d’armes soit plus élevé que par le passé, il n’en demeure pas moins qu’une fois les bonnes armes trouvées selon notre style de jeu privilégié, on risque de demeurer avec ces dernières pour la majorité de l’aventure. Cela revient à dire qu’on utilise les mêmes armes durant une bonne partie du jeu, d’autant plus qu’une grande majorité d’ennemis peut s’éliminer avec une bonne vieille balle dans le crâne, peu importe leurs faiblesses ou l’arme qu’on utilise. Autrement, si on se retrouve coincé, on peut toujours se rabattre sur notre nouveau gadget apposé sur notre dos qui permet de massacrer nos ennemis sur un large rayon, et ce, très tôt durant notre périple sur Yara. Attendez-vous donc à récolter bien du butin inutile durant vos dizaines d’heures sur Yara.
Sinon, l’intelligence artificielle demeure aussi médiocre que par le passé. Les ennemis réagissent lentement à notre présence et ils agissent comme s’ils n’avaient pas de cerveau. Généralement, ils se contenteront de tirer dans tous les sens et votre défi se présentera devant le nombre d’opposants qui vous feront face plutôt qu’au niveau des tactiques déployées par l’intelligence artificielle. Tout comme dans Far Cry 5, vous assisterez aussi à des scènes aussi improbables que pathétiques lors desquelles des citoyens ou bien des animaux détruiront des structures ou fonceront dans des barrières sans raison.
D’autre part, le pilotage de certains véhicules demeure aussi arcade et problématique que par le passé. Les petits bateaux et les avions sont particulièrement difficiles à manoeuvrer, ce qui vous fera jurer lors des courses à relais. Étrangement, ce sont les nouveaux chevaux qui m’ont paru plus faciles à diriger en vue à la première personne. Leurs mouvements sont tout simplement plus précis et ils peuvent se faufiler dans des endroits sinueux bien plus aisément que la majorité des véhicules du jeu, m’ayant amené à les privilégier lorsque j’étais sur terre.
Finalement, contrairement à Far Cry 5, les animaux alliés n’ont qu’une utilité relative. Bien qu’ils puissent débloquer des habiletés spéciales en atteignant certains objectifs personnels, les animaux que l’on acquiert ne servent pratiquement à rien. Pour vous dire, j’ai carrément oublié leur existence et je n’ai même pas pensé les ressusciter une fois qu’ils sont tombés en combat tant je me suis bien débrouillé avec les armes et gadgets de Dani. Dommage puisque les alliés de Far Cry 5 avaient une réelle utilité lors des affrontements.
Devriez-vous y jouer ?
Même si j’ai eu de la difficulté à embarquer dans le jeu lorsque je l’ai commencé, Far Cry 6 est indéniablement meilleur que les deux derniers opus de la série. Plus diversifié, mieux étoffé et tout simplement plus prenant en solo ou bien à deux joueurs, Far Cry 6 est le meilleur volet de la série depuis Far Cry 3. Ainsi, malgré ses défauts, il s’agit d’un jeu de tir à la première personne à monde ouvert divertissant qui plaira sans aucun doute aux amateurs de la franchise. À l’instar d’un plat dans un fast-food, Far Cry 6 est gros, plutôt gras et sans grande originalité, mais totalement satisfaisant dans sa prévisibilité.