Brevets, pourquoi c’est la guerre?

Détournés de leur but initial, le brevet et le dépôt de plainte se sont mués en une véritable arme. À tel point que toutes les grandes entreprises technologiques actuelles sont empêtrées dans des procès. Mais comment en est-on arrivé là?

Il ne se passe pas une semaine sans qu’un procès portant sur des brevets oppose deux compagnies. Selon Google, ils occasionnent plus de 30 milliards de pertes aux États-Unis chaque année. Pourtant, cette pratique a été encouragée jusqu’à son paroxysme, jusqu’à ce que l’administration Obama décide de s’attaquer au problème, et plus particulièrement à celui des «patent troll».

Ces compagnies tirent leurs revenus des licences qu’elles accordent sur les brevets qu’elles détiennent. Pourtant, elles ne créent aucune technologie et ne développent aucun produit. Leur secret, elles possèdent un portefeuille de brevets dits «logiciels».

Des brevets logiciels et une cour favorable

Interdits en Europe, les brevets logiciels diffèrent des brevets classiques. Contrairement aux brevets qui permettent de breveter une technologie réelle, le brevet logiciel offre de breveter une idée ou un principe. Mais ce mécanisme comporte une faille de taille, puisque n’importe quel concept peut alors être déposé sans réalisation technique. Par exemple, prenons la voiture volante. Elle n’existe pas, mais il est tout à fait possible d’en déposer le brevet. Une fois qu’une entreprise l’aura inventée et commercialisée, il suffira de porter plainte au motif que l’on possède l’antériorité du projet.

Ainsi, des plaintes sont même déposées pour l’utilisation de brevets essentiels. Les créateurs ont alors l’obligation de céder la licence, et sont rémunérés quelques centimes sur chaque appareil. Mais multipliés par des millions, leurs revenus sont ainsi assurés.

Pour avoir de grandes chances d’aboutir, celle-ci doit être déposée dans le bon tribunal. La plupart des plaintes aux États-Unis ont été déposées devant les tribunaux de l’est du Texas, connus comme étant particulièrement favorables aux détenteurs de brevets.

Bien que quelques pays comme les États-Unis, l’Angleterre ou le Japon reconnaissent les brevets logiciels, le fait de pouvoir porter plainte aux États-Unis est une très grande force pour les plaignants. Plus gros marché mondial en terme de consommation, et où l’innovation est une culture, la médiatisation d’une plainte y est assurée, et les conséquences d’un jugement défavorable peuvent être catastrophiques, allant jusqu’à l’interdiction d’un produit. Ce jugement influe finalement sur les autres pays, puisque les produits ne sont pas développés uniquement pour le marché américain.

Les dangers

Il n’y a pas que les patent troll qui ont recours aux brevets logiciels, des sociétés comme Microsoft ou Oracle en tirent également des revenus. Microsoft s’en est d’ailleurs récemment servi dans une plainte contre Motorola, en brandissant sept brevets logiciels. En cause, la synchronisation des messages. Comme le brevet logiciel permet de déposer un principe, la synchronisation du courrier entre dans ce champ. Même si la programmation pour créer cette fonction est différente, le droit américain peut le considérer comme une violation suivant l’interprétation du juge.

Encore plus pernicieux, ces brevets peuvent devenir une arme afin d’exercer un véritable chantage. Les petites sociétés qui créent de nouvelles technologies n’ont pas les moyens d’assurer un procès de plusieurs années face à des patent troll et leur armée d’avocats. Elles n’ont alors d’autre choix que de leur verser des redevances pour exploiter leur propre technologie. Et si c’est un concurrent bien plus important qui porte plainte, il peut refuser tout arrangement et la pousser ainsi à la faillite.

Porter plainte par habitude

Cette pratique de porter plainte a finalement dégénéré en stratégie. Ainsi, des plaintes sont même déposées pour l’utilisation de brevets essentiels. Un brevet essentiel porte sur une technologie qui devient une norme, par exemple le Bluetooth. Les créateurs ont alors l’obligation de céder la licence, et sont rémunérés quelques centimes sur chaque appareil. Mais multipliés par des millions, leurs revenus sont ainsi assurés. Devenue une véritable arme, la plainte est déposée même si le plaignant sait qu’il va être débouté, afin de causer du tort au concurrent.

Dans le cas d’une petite compagnie, une plainte peut ainsi laisser croire à des investisseurs qu’ils risquent de miser sur une technologie qui ne leur rapportera que des problèmes. Ce n’est pas nouveau, mais lorsque la pratique se généralise à ce point, il ne faudra pas seulement une réforme des patent troll et du brevet logiciel, mais également un changement de comportement de la part des entreprises.

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