En attendant Gordon Freeman

Half-Life 3 sera décevant. Impossible qu'il en soit autrement : plus d'une décennie après le lancement de la deuxième mouture de la saga et sept ans après la parution de Half-Life 2 : Episode 2, les attentes sont tellement élevées qu'il est impensable que Gabe Newell et sa bande de chez Valve soient en mesure d'y répondre efficacement.

Et pourtant… et pourtant, les joueurs – dont je suis – espèrent encore. Après tout, ne faut-il pas clore l’histoire de Gordon Freeman, docteur en physique et employé de bas niveau du centre de recherche Black Mesa, embarqué malgré lui dans un conflit entre des forces qui le dépassent? Les aventures de cet homme aux lunettes noires, à la barbichette et à l’iconique barre à clous sont tellement populaires que Valve n’a même pas besoin d’alimenter les rumeurs pour que celles-ci se multiplient d’elles-mêmes.

Les jeux vidéo ont cela de particulier qu’ils sont intimement liés à l’apport du joueur, d’où cet investissement émotionnel plus important envers ce que leurs développeurs tentent de nous raconter, un pixel à la fois.

Le phénomène n’est certainement pas restreint aux jeux vidéo; l’exemple du prochain Star Wars vient tout de suite en tête. Mais les divertissements électroniques ont cela de particulier que leur résultat est directement influencé par l’apport du joueur. D’où, sans doute, cet investissement émotionnel plus important envers les diverses histoires que les développeurs tentent de nous raconter, un pixel à la fois.

Méfiance

Si cet engouement a du bon, les mauvaises surprises ne datent pas d’hier, et semblent même se multiplier avec les années. Qui se rappelle de Daïkatana, du légendaire développeur John Romero (Doom et Quake, pour ne nommer que ceux-ci), qui devait déferler tel un tsunami sur le milieu des jeux vidéo? Au lieu du Messie tant attendu, Romero présenta plutôt, après moult retards, un produit carrément médiocre, et Daïkatana est encore connu aujourd’hui comme un ratage complet.

Idem pour Duke Nukem Forever, la suite de l’excellent Duke Nukem 3D, développé pendant un temps par 3D Realms, pour ensuite tomber dans l’oubli, et être ultimement récupéré par Gearbox. Un jeu qualifié de vieillot dès sa sortie, et depuis condamné aux ventes Steam et aux ventes à perte. En fait, Duke Nukem Forever était considéré comme l’exemple ultime du vaporware, un produit annoncé qui disparaissait ensuite pour ne plus laisser de traces. On a même compilé la liste des accomplissements humains notables ayant nécessité moins de temps que la sortie de ce jeu.

D’ailleurs, si l’on jette un coup d’oeil à cette liste, on constate que depuis l’annonce de Duke Nukem Forever, en 1997, la franchise Mario a eu droit à 50 itérations, contre 75 titres de l’univers de Mega Man, pour ne nommer que ceux-là.

Gabe Newell, le nouveau Messie des adeptes de jeux vidéo?
Gabe Newell, le nouveau Messie des adeptes de jeux vidéo?

Mais malgré les écueils sur lesquels d’autres jeux se sont échoués, la ferveur demeure. À un point tel, en fait, que l’on peut s’interroger à savoir si les amateurs de Half-Life et de Valve n’ont pas adopté une ferveur religieuse. Ne trouve-t-on pas, sur le site Reddit, la sous-section PC Master Race, où l’on parle de Gabe Newell comme du Saint GabeN? On y parle aussi de son ordinateur PC comme d’un sanctuaire. De l’humour et de l’autodérision, certainement, mais aussi un développement fascinant du fan-club de celui qui apparaît, telle une icône religieuse, distribuant des rabais lors des ventes sur la plateforme Steam.

Ceci est mon jeu, prenez-en tous

Du regroupement de joueurs adeptes d’une franchise numérique à l’appartenance à une structure religieuse ordonnée, il y a toutefois plusieurs pas qu’il n’est pas nécessaire de franchir pour saisir l’importance d’un aspect central à la notion de désir d’appartenance. En rejoignant le hype train chaque fois que quelqu’un semble avoir découvert une nouvelle preuve venant «confirmer» le développement de Half-Life 3, ces individus doivent pertinemment savoir qu’ils trouveront toujours matière à redire sur le produit final.

Fondamentalement, cette passion n’est effectivement pas si différente de la ferveur religieuse; il suffit d’avoir la foi. Le reste n’a pas d’importance, quitte à être déçu en fin de compte.

Cela ne les empêche pas de financer, à coups de millions de dollars, des œuvres qui suscitent leur intérêt. L’exemple de Star Citizen fera d’ailleurs école. L’un des premiers grands jeux vidéo à recevoir du sociofinancement via la plateforme Kickstarter, ce titre compte désormais plus de 50 millions de dollars US dans ses coffres, grâce non seulement à cette campagne de financement réussie, mais aussi à la vente de vaisseaux utilisables dans le jeu.

Et que dire du phénomène de la précommande qui déferle sur Steam, malgré les avertissements et les risques de payer pour un produit incomplet et mal ficelé? Soyons honnêtes : cet appel à la retenue ne vaut que pour les compagnies envers qui les joueurs n’ont pas confiance. Si Valve annonce Half-Life 3, je serai très heureux d’envoyer, à l’avance, mes deniers pour garnir les coffres de l’entreprise.

Fondamentalement, cette passion n’est effectivement pas si différente de la ferveur religieuse; il suffit d’avoir la foi. Le reste n’a pas d’importance, quitte à être déçu en fin de compte.

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