Après un retour en beauté de la franchise Deus Ex en 2011, Eidos Montréal s’est attelé à sa suite sur la nouvelle génération de consoles. Au programme, un jeu qui reprend globalement les mêmes principes que son aîné, avec son lot de nouveautés, mais qui ne dépaysera pas ceux qui l’ont joué.
Déjà côté histoire, l’écrivaine derrière ce scénario, Mary DeMarle, a imaginé une énorme trame. On a donc droit à quelque chose de cohérent et pensé depuis des années. Pas de scénario à rallonge digne de Resident Evil qui part on ne sait plus où, mais quelque chose de solide.
Scénario
L’histoire se situe deux ans après les évènements de Human Revolution. Les augmentés vivent désormais une ségrégation totale de la part des gouvernements. Les Illuminatis continuent leurs sombres plans, tandis qu’un groupe terroriste constitué d’augmentés, le CDA, pose des bombes un peu partout. On retrouve Adam Jensen au milieu de tout ça, chargé de faire la lumière sur les véritables intentions qui se cachent derrière ces actes.
Riche, riche et encore riche. Comme dans Human Revolution, le scénario offre toujours une construction réellement soignée. On ne voit rien venir de ce qui va se passer. Pas question ici de petite trahison, mais de dissimulations et de doubles faces aux multiples mystères qui vont vous surprendre jusqu’à la twist contenue dans le générique de fin [NDLR : Divulgâcheur potentiel]. Chaque mission principale offre son lot de révélations, tandis que les décisions à opérer dans les missions secondaires pourront même se répercuter au niveau de l’histoire.
D’ailleurs, il y aura à faire quelques choix parfois déchirants et qui auront un réel impact sur la conclusion du jeu. Résultat, une fois le générique terminé, j’ai lancé une nouvelle partie en conservant mon armement et mes augmentations débloquées.
Enfin, on n’a pas l’impression d’être devant quelque chose d’impersonnel. Les personnages secondaires ont bénéficié également d’un grand soin afin de les rendre crédibles.
Jouabilité
Il est rare de ne pas pouvoir faire quelque chose à cause des commandes.
Si elle s’avère précise pour vivre l’expérience proposée, la jouabilité demande néanmoins un temps d’adaptation. Autrement, les développeurs permettent de choisir les mêmes commandes que Human Revolution ou proches de jeux comme Call of Duty ou Destiny.
Il est rare de commettre une faute ou de ne pas pouvoir faire quelque chose à cause des commandes. Le jeu a fait l’objet d’un gros travail de QA. De proche, les exécutions sont faciles à placer, et l’on sent que le jeu a été longuement étudié pour que la jouabilité ne vous prenne pas en défaut.
J’ai tout de même un reproche à adresser à la sensation des armes en main qui semblent légères. On n’a pas l’impression comme dans un Destiny ou un Battlefield de sentir toute l’arme en main. Il y a comme un décalage ou quelque chose qui ne colle pas entre le tir, la manière de reculer de l’arme ou les vibrations dans la manette. Alors, on s’y fait, et on peut mettre des tirs dans la tête au pistolet de loin, mais voilà, il y a cette sensation que votre arme pèse quelques centaines de grammes.
Technique
Un fossé sépare techniquement ce jeu de son prédécesseur. Par contre, le moteur est un peu en dessous des meilleures productions actuelles. Comme dans Human Revolution cependant, la direction artistique verse tellement dans l’excellence que l’on a vite fait d’oublier cet aspect.
Les textures de peau ou de métal ultra réalistes ne sont pas à l’ordre du jour. Elles semblent ici issues d’un comics actuel. Seuls les tissus bénéficient finalement d’un réalisme très poussé. De toute façon, on pleure de bonheur face au design des différents éléments robotiques, et la cohérence visuelle de l’ensemble. Les effets des diverses armes et nouvelles améliorations de Jensen et de ses ennemis donnent le goût de brailler de joie. C’est un jeu totalement d’ambiance qui vous immerge solidement.
Petit regret toutefois, l’intelligence artificielle est plutôt moyenne.
Petit regret toutefois, l’intelligence artificielle est plutôt moyenne. Elle pourra cependant vous donner du fil à retordre si vous décidez de ne pas la feinter en allant vous cacher. Mais généralement, on prend vite l’avantage. À noter que les ennemis peuvent vous voir de loin et sur plusieurs étages. Leur champ de vision est très juste dans le sens où ils ne vous verront pas à 500 mètres cachés derrière une caisse.
On rencontre malheureusement quelques ralentissements sporadiques dans les villes aussi bien sur Xbox One que sur PlayStation 4. À noter que ni la version Xbox One à laquelle j’ai joué ni celle que j’ai essayée sur PlayStation 4 n’ont reçu de mise à jour. De plus, les chargements peuvent parfois être longs, surtout lorsqu’on recommence après être mort. Pas de réinitialisation du niveau, le jeu le charge au complet.
Mise en scène
La mise en scène est particulièrement solide. Le jeu comporte de nombreuses cinématiques qui alternent très bien avec les phases d’action.
Du début à la fin, on n’a pas vraiment envie de lâcher la manette avant de l’avoir fini. On a droit à des cinématiques impressionnantes, et il comporte différentes fins utilisant le moteur du jeu. De ce côté, les développeurs ont entendu doléances des joueurs qui avaient peu goûté les cinématiques ayant conclu Human Revolution.
Progression
Elle est similaire à Human Revolution, façon mini RPG. Dans les villes, vous effectuerez de nombreuses missions secondaires, auxquelles viennent désormais s’ajouter les missions Points d’intérêt. Les missions principales peuvent se passer dans d’autres parties de la ville, ou à l’étranger. Dans ce dernier cas, il ne sera pas possible de revenir une fois la mission finie. Faire les missions secondaires en premier sera une priorité si vous voulez finir les niveaux à 100%. On trouve également dans la ville des marchands pratiques pour magasiner des améliorations et revendre votre stock.
Deus Ex vous laisse toujours cette liberté incroyable dans votre progression, à tel point qu’il est possible de faire le jeu sans tuer un seul ennemi. Alors oui c’est faisable, mais il faudra connaître le jeu par cœur ou jouer de la sauvegarde. Les niveaux offrent de multiples embranchements. À part quelques rares missions dans les dix premières heures qui demanderont un niveau de piratage à 2 ou 3 sur 5 pour être effectuées, le jeu laisse totalement libre de choisir les augmentations que l’on veut et de jouer en fonction.
Côté augmentation d’ailleurs, Jensen bénéficie de plusieurs nouvelles fonctionnalités vraiment pratiques. Entre le piratage à distance, l’armure intégrale ou encore une vitesse supersonique, il y a de quoi enrichir grandement les mécaniques de base amenées par Human Revolution.
On est toutefois un peu moins plongé dans le jeu que dans Human Revolution. Il a énormément d’intérêt, mais il y a un petit quelque chose de différent. Est-ce dû à l’absence d’ennemis charismatiques qui feraient figure de boss durant le jeu? Oui vous l’avez bien lu, avant le boss final, vous n’aurez pas véritablement de boss à affronter durant l’aventure. Il est faisable d’aller chercher des ennuis à un soldat en armure assistée, mais aucun boss à éliminer durant le jeu, c’est quand même dommage.
Enfin, le niveau de difficulté à partir de Normal est clairement orienté pour les gamers. Les ennemis sont placés stratégiquement, et il n’est pas facile de progresser comme dans un FPS classique. Le jeu en lui-même dure un minimum de 30 heures.
Ambiance
Les musiques composées par Michæl McCann et Sasha Dikicyian sont dans l’esprit de Human Revolution. Futuriste, tout en restant mélodieuse, elle colle souvent à l’action ou à l’ambiance. Aucune fausse note donc.
Les différents bruitages venant des armes ou des robots offrent un très bon rendu. La version française s’avère tout à fait honnête, même si l’anglais reste comme souvent un cran au-dessus du côté du jeu des acteurs. Les doublages des personnages principaux sont toutefois d’un très bon niveau.
Multijoueur
Le mode Breach n’est pas du vrai multijoueur, mais verse dans le compétitif en comparant vos temps avec les autres joueurs. Vous êtes un programme à forme humaine. Dans un ordinateur, il vous faut accéder à des données et les télécharger en évitant des pièges comme des tourelles, ou des robots de défense. Une fois ces données téléchargées, toutes les portes se ferment et à vous de vous diriger dans un temps limité vers la sortie.
Il est possible également d’utiliser des bonus avant certaines parties durant lesquelles l’ordinateur en utilisera aussi son avantage, rendant les parties encore plus tendues. Les développeurs promettent d’enrichir le jeu de nouveaux challenges dans le futur.
C’est un mode sympathique, avec d’excellentes idées. Je ne me vois pas passer mes nuits dessus, mais c’est un plus à ce jeu. Il a surtout le mérite d’avoir inventé des règles simples, mais diablement efficaces, et on ressent le temps qui nous souffle dans le cou lorsqu’il faut s’échapper.
Conclusion
Il y a un petit quelque chose qui m’a moins captivé que dans Human Revolution. Je l’ai parcouru plus rapidement alors que j’ai pourtant fait le jeu presque au complet (j’ai loupé une mission secondaire). En fait, arrivé à la fin, on aurait aimé en avoir plus, ne serait-ce que côté missions secondaires. Alors oui, il y en a beaucoup, mais malgré les 30 à 40 heures pour le finir, ça passe assez vite au final. Surtout que Human Revolution est sorti en 2011, et que j’ai tellement attendu cette suite.
On se console avec sa liberté d’action plutôt fantastique qui permet de l’appréhender comme on veut. Et côté ambiance, rares sont les jeux à proposer quelque chose d’aussi cohérent et viscéralement personnel. Les gamers y trouveront en plus leur compte avec une difficulté qui n’a pas été sacrifiée sur l’autel du grand public. On regrette par contre l’absence de boss, ce qui crée au final moins de tension dans l’aventure.