Québécor dénonce une étude favorable à La Presse+

Selon le Centre d'études sur les médias de l'Université Laval, La Presse+ a dominé le marché de l'information des applications mobiles en 2015. Une position qui n'est pas partagée par son principal concurrent, Québécor.

C’est non sans fierté que Guy Crevier, président et éditeur de La Presse, a souligné le 16 avril dernier que trois ans après son lancement, l’application La Presse+ était consultée en moyenne par près de 260 000 tablettes uniques au quotidien. Il a évidemment profité de l’occasion pour faire le bilan du chemin parcouru depuis son lancement, citant au passage une récente étude qui positionne La Presse+ au premier rang du marché des applications mobiles d’actualités.

Selon le Centre d’études sur les médias, La Presse+ représentait 42,7% du marché de l’information des applications mobile au Québec en 2015.

L’étude en question, intitulée Les Québécois et l’information à l’ère du numérique, a demandé à un échantillon de 473 personnes représentatif de la population francophone d’indiquer combien de temps en minutes ceux-ci passaient à consulter certaines applications d’actualités selon une liste préétablie.

Résultat? Après avoir synthétisé à la fois le nombre d’utilisateurs et la durée de l’utilisation en minutes de chacune des applications, La Presse+ est arrivée en tête de liste avec un score fracassant de 42,7%, suivi de Radio-Canada avec 15,5%, MétéoMédia (12,5%), et RDS (9,5%). La première application de Québécor à s’inscrire à ce tableau est celle du Journal de Montréal, J5, avec 6%. Les applications TVA Sports (4,5%), Le Devoir (1,7%), L’Actualité (1,4%), et Canoë – LCN (1%) ferment ainsi la marche derrière la catégorie Autres (5,2%).

Un tel portrait défavorable à l’égard de Québécor est bien entendu susceptible de nuire aux pourparlers de l’entreprise avec ses annonceurs, laissant par conséquent planer un doute sur les chiffres avancés par le groupe médiatique.

Un portrait inexact, voire trompeur, selon Québécor

quebecor

Lundi dernier, Le Devoir rapportait que le groupe Québécor dénonçait publiquement l’étude universitaire, remettant ainsi en question la rigueur de la méthodologie employée par le Centre d’études sur les médias.

Selon la présidente et chef de la direction de Québécor Groupe Média, Julie Tremblay, les chercheurs ont privilégié une approche basée sur les perceptions des participants plutôt que de fonder leur étude sur de véritables statistiques liées à l’utilisation.

«Il existe aujourd’hui des outils d’audimétrie utilisés et reconnus par tous les acteurs du marché – comScore, Numeris et autres – qui permettent d’avoir un portrait quantifié, objectif et en temps réel de la consommation des médias numériques par la population», a déclaré Mme Tremblay. «Ces outils, qui reflètent très précisément la réalité, sont d’ailleurs utilisés quotidiennement par Groupe TVA, qui a le devoir et la responsabilité de livrer des rapports fiables à ses annonceurs sur la performance de leurs campagnes publicitaires.»

«Pour nous, cette étude est invalide puisqu’elle manque d’assises méthodologiques rigoureuses», a-t-elle poursuivi.

Dans son communiqué (étrangement absent de la liste affichée sur son site), Québécor souligne notamment que des sites et des applications auraient également été omis dans les choix de réponses de certaines questions.

Réponse du Centre d’études sur les médias

Le troisième acte de cette controverse s’est concrétisé aujourd’hui avec la publication d’une lettre ouverte destinée à la Mme Tremblay signée par Florian Sauvageau, directeur du Centre d’études sur les médias de l’Université Laval.

«Vous semblez confondre les objectifs et la nature des outils de mesure de l’audience auxquels vous faites référence et nos travaux.»

«De façon générale, vous semblez confondre les objectifs et la nature des outils de mesure de l’audience auxquels vous faites référence et nos travaux dont le but est de comprendre, sur une longue période, l’évolution des habitudes des Québécois francophones en matière d’information», croit M. Sauvageau. «Comme l’expliquent les auteurs de l’étude, les méthodes qu’ils utilisent sont courantes en sciences sociales.»

«Québécor peut bien ne pas aimer les conclusions de cette étude. Vous pouvez aussi en critiquer certains aspects», poursuit-il. «C’est normal. Les discussions que de telles observations peuvent engendrer sont souvent utiles. En revanche, l’utilisation de termes abusifs (“fallacieux”, “trompeur”), que contient votre texte, qui sont de nature à laisser entendre que les auteurs auraient voulu induire les lecteurs en erreur, nous a étonnés.»

Il est intéressant de souligner que de l’aveu même des auteurs de l’étude, l’approche employée dans le cadre de cette étude «est évidemment imparfaite» en ce qui concerne la méthode de recrutement des participants (qui proviennent de cinq régions du Québec – Laval, Montréal, Québec, Rivière-du-Loup et Victoriaville). C’est donc avec une certaine humilité que les résultats ont ainsi été présentés par les chercheurs, qui précisent que les marges d’erreur statistiques de leur étude se situent à environ ±4,5%, 19 fois sur 20.

La lettre en réponse aux déclarations de Québécor est accompagnée d’un document qui apporte des précisions sur le but de l’étude Les Québécois et l’information à l’ère du numérique. Voici certains extraits pertinents :

«L’objectif de notre étude est de mesurer l’évolution des habitudes des Québécois francophones en matière d’information sur différentes plateformes, traditionnelles comme numériques. Elle ne remplace évidemment pas les outils qui existent dans les différents secteurs de l’industrie pour mesurer l’audience d’une émission de télévision ou de radio, le lectorat d’un journal ou la fréquentation d’un site web ou d’une application pour mobiles. Ces études, menées notamment par Vividata, Numeris et comScore considèrent chacun de ces modes d’information et de divertissement isolément, et visent spécifiquement à répondre aux besoins des annonceurs.»

«En ce sens, nous comprenons parfaitement votre mise au point, et votre rappel des sources existantes et reconnues par l’industrie concernant la mesure des médias numériques.»

«Cependant, pour les objectifs différents que nous poursuivons, notre méthodologie est rigoureuse, exempte de toute préoccupation commerciale, et fournit un portrait des habitudes des Québécois francophones utile à une analyse sociale, économique et politique non seulement pour les médias eux-mêmes, mais aussi pour les usagers et des acteurs de la vie publique. Nous rejetons donc fermement toute accusation de “manque de rigueur scientifique”.»

Depuis 2007, le Centre d’études sur les médias de l’Université Laval se penche sur le comportement des Québécois francophones en matière d’information. Il est possible de télécharger gratuitement l’ensemble de leurs publications à partir de leur site web.

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