Depuis son dévoilement, Sifu a suscité de l’intérêt pour deux raisons. En effet, la perspective d’enchaîner des techniques d’arts martiaux couplée à un vieillissement de notre personnage relié à son nombre de morts est un concept intéressant et plutôt original. Désormais disponible, Sifu remplit ses promesses si ce n’est que la moindre erreur vous coûtera cher.
- Disponible sur: PlayStation 4, PlayStation 5, PC
- Prix: 66,99$ + txs
Une quête de vengeance étrangement intéressante
À la base, Sifu est une simple quête de vengeance. Alors que vous étiez âgé de douze ans, vous avez assisté au meurtre de votre père. Au cours des huit années suivantes, vous vous êtes entraîné sans relâche dans un seul but: massacrer les cinq personnes responsables de la disparition de votre paternel. Du haut de vos vingt ans, ce sera à vous d’aller à la rencontre de ces sinistres personnages afin de vérifier si toutes vos années d’entraînement ont porté fruit.
Bien franchement, le scénario de Sifu n’est pas l’élément qui vous accrochera à cette aventure. Le protagoniste, qui demeure sans nom, n’offre que des répliques sans saveur et les éléments d’enquête que l’on découvre en parcourant les niveaux n’ont pratiquement aucun intérêt. En revanche, il y a quelque chose qui nous attache à notre jeune héros. Puisqu’on a incarné le meurtrier de son père dans le prologue, on a une étrange envie d’exercer notre vengeance et de découvrir pourquoi son père était ciblé.
Paradoxalement, l’histoire du jeu parvient donc à nous accrocher sans pour autant présenter un contexte narratif puissant. C’est étrange, mais cela permet de mettre la table pour un jeu de kung-fu n’ayant pas son pareil.
Combats exaltants et techniques inutiles
À la base, Sifu vous apparaîtra comme un simple jeu de combat mettant de l’avant les arts martiaux. À l’aide de vos aptitudes classiques de départ, vous pourrez frapper avec des attaques légères et puissantes, en plus de pouvoir esquiver. Tout au long de votre aventure, vous aurez l’occasion de débloquer des techniques plus avancées afin de mieux vous défendre. Malheureusement, la majorité ne sont qu’accessoires. Certes, j’ai utilisé quelques-unes des aptitudes verrouillées, mais j’ai laissé de côté le 3/4 d’entre elles en privilégiant les simples attaques disponibles dès le départ.
Malgré la futilité d’une majorité de techniques, Sifu réussit dans son principal domaine: celui de nous donner l’impression d’incarner un puissant maître d’arts martiaux. Le studio SloClap a mis beaucoup d’emphase sur les chorégraphies et cela paraît. Les mouvements des personnages sont fluides et à mesure que l’on maîtrise le style du jeu, on acquiert ce sentiment d’être un expert du kung-fu. C’est tout simplement grisant que de battre des groupes d’ennemis, d’autant plus que l’on s’améliore de plus en plus à force d’apprendre la structure de chaque niveau et les attaques de nos adversaires.
Ceci dit, vous n’aurez pas qu’à vous battre à mains nues. En effet, le jeu offre une variété d’armes à travers chacun de ses niveaux, du balai au tuyau de métal en passant par le bâton de bambou et la machette. Extrêmement utiles, ces armes vous permettront non seulement de blesser plus sérieusement vos ennemis, mais aussi de les étourdir plus facilement. Une fois les techniques relatives aux armes débloquées, vous verrez qu’elles vous donneront un avantage indéniable durant votre périple, diminuant par le fait même la difficulté prononcée du jeu.
Par ailleurs, Sifu utilise avec succès l’un des systèmes présents dans le jeu Sekiro: Shadows Die Twice. Ainsi, le système d’étourdissement de ce titre est réutilisé de belle façon. Une fois la jauge d’étourdissement d’un ennemi remplie, il deviendra vulnérable et sera exposé à vos attaques. Le même sort vous attendra si vous bloquez trop d’attaques ou subissez trop de dégâts. Et comme je le mentionnais, les armes jouent un rôle crucial sur ce point, permettant d’étourdir plus rapidement vos ennemis. Tirez-en profit, votre plaisir n’en sera que décuplé lorsque vous confronterez vos adversaires !
Difficulté très pimentée
Comme je le mentionnais, la difficulté de Sifu est élevée. En fait, c’est ce point qui risque de faire décrocher une majorité de joueurs. Le jeu pardonne peu et ceux n’ayant pas la patience de refaire encore et encore des niveaux pour apprendre leur structure par coeur laisseront tomber l’aventure de SloClap rapidement.
Grosso modo, Sifu vous encourage à refaire les niveaux proposés afin de les maîtriser totalement. Au départ, la difficulté ne semble pas trop corsée, mais dès la moitié du premier niveau, vous constaterez à quel point le jeu peut être cruel. En plus de la puissance de vos adversaires, le temps de réaction pour esquiver des attaques est minime. Ce peut prendre des heures pour simplement maîtriser le système d’esquive non pas en raison de sa complexité, mais bien parce qu’il exige une réactivité hors du commun.
Évidemment, vous devez vous attendre à mourir très souvent et à recommencer votre partie régulièrement. Même si, techniquement, le jeu peut se terminer en une poignée d’heures, je doute fortement que vous parviendrez à le traverser en moins de dix heures. Et encore, une fois le jeu terminé, certains défis sont si difficiles que les plus aguerris en auront pour un bon moment afin de surmonter tout ce que Sifu a dans le ventre. Joueurs sur les consoles de Sony, tentez simplement d’obtenir votre trophée Platine, vous verrez que vous en aurez pour bien plus d’une dizaine d’heures pour atteindre cet exploit !
La difficulté du jeu s’adoucit tout de même en raison de quelques éléments rogue-lite. Lorsque vous trouverez des sanctuaires ou que vous mourez, vous aurez l’occasion de débloquer des bonis selon trois catégories ainsi que des techniques avec les points d’expérience accumulés. Bien qu’uniques à votre partie en cours au début, ces techniques pourront devenir permanentes à force d’échanger certains montants d’expérience contre elles. Ces montants échangés seront conservés d’une partie à l’autre, vous permettant graduellement de les débloquer indéfiniment.
Le jeu vous offre donc un choix: débloquer un maximum de techniques dans une partie afin que celles réellement utiles vous aident à traverser le jeu ou prendre son temps et les débloquer de façon permanente même si cela signifie devoir recommencer les niveaux encore et encore. La décision vous appartiendra, mais sachez qu’au bout d’un moment, certaines de ces techniques débloquées en permanence rendront votre tâche moins ardue.
Quand mourir rime avec vieillir
L’aspect le plus original de Sifu est sans aucun doute comment il aborde la façon dont vous mourez. Au-delà des éléments rogue-lite, la mort sera directement reliée à l’âge de votre personnage. Ainsi, plus vous mourez, plus votre personnage vieillira !
Dès le début du jeu, vous comprendrez que vous pouvez revenir à la vie grâce à un mystérieux pendentif conservant votre nombre de morts. Divisé en cinq tranches d’âge, ce pendentif fera en sorte que votre âge augmentera selon votre nombre de trépas. Par exemple, si vous mourez une fois, votre âge augmentera d’une année. Or, mourez dix fois contre un boss et votre âge augmentera d’une dizaine d’années d’un coup ! Passé 70 ans, vous n’aurez qu’une dernière chance avant de mourir définitivement de vieillesse. Fort heureusement, certains ennemis plus difficiles à vaincre peuvent faire baisser votre compteur de morts.
Ceci dit, l’une des grandes difficultés du jeu réside dans le fait que l’âge de votre personnage sera conservé entre les niveaux. Simplement dit, vous commencerez ou pourrez recommencer un niveau avec l’âge le plus bas que vous aviez en le débutant. Donc, si vous avez commencé un niveau à l’âge de 65 ans parce que vous êtes mort trop souvent dans le niveau précédent, vous n’aurez que deux chances de le traverser…et cela compliquera davantage votre tâche pour le niveau suivant !
L’objectif de Sifu est donc de demeurer jeune en mourant le moins souvent possible. Et pour cela, le jeu vous demandera tout bonnement de le maîtriser. C’est pourquoi vous devrez refaire encore et encore les tableaux offerts puisqu’il serait très surprenant (voire tout bonnement impossible) que vous parveniez à terminer le jeu sans mourir de vieillesse avant au moins quelques essais. C’est une façon unique, originale et surprenante d’aborder la mort de notre personnage dans un jeu, même si cela implique aussi une bonne dose de patience pour venir à bout de ce dernier.
Malgré tout, vieillir n’aura pas que des désavantages. À chaque tranche de dix ans, votre personnage aura moins de vitalité, mais frappera plus fort. Ainsi, votre corps vieillissant sera plus frêle, mais votre maîtrise du kung-fu aura davantage d’impact sur vos ennemis. C’est un défi de se conserver suffisamment jeune jusqu’au boss final, mais sachez que tout ne sera pas négatif dans le fait de trépasser !
Kung-fu imparfait
En terminant, outre la patience, le jeu risque de faire grincer des dents certains joueurs en raison de quelques problèmes.
Visuellement, SloClap a adopté un style à l’image du reste de son jeu: très particulier. On a l’impression de voir des personnages comme s’ils étaient tirés d’une bande-dessinée. Or, j’ai plutôt eu un drôle de sentiment en voyant le visuel de Sifu. Les personnages sont très polygonaux et les textures sont en basse résolution dans l’ensemble du jeu. Qui plus est, la palette de couleurs est loin d’être exquise. Quelques niveaux (dont le second prenant place dans un club) ressortent du lot, mais globalement, c’est un jeu peu impressionnant au niveau du graphisme.
Autrement, le jeu peut être très frustrant en raison des angles de caméra. Trop rapprochée de notre personnage dans les endroits clos, la caméra a aussi du mal à suivre l’action à certains moments. C’est particulièrement problématique lorsqu’on se retrouve encerclé par des ennemis et qu’on se fait frapper parce qu’on n’a tout simplement pas vu un bandit dans notre dos. Considérant leur force de frappe, il y a un danger pour qu’on brise notre manette de frustration.
Sifu est également un jeu fort répétitif, et ce au-delà du fait qu’il faille refaire les niveaux pour les maîtriser. Les tableaux sont très linéaires et mettent uniquement l’accent sur les combats. Le peu d’objets à récolter ne servent qu’à remplir un tableau d’enquête étant tellement secondaire qu’on n’y porte aucune attention. Malgré tout, Sifu permet de débloquer des accès en trouvant certains objets, incluant dans des niveaux ultérieurs. Ce faisant, vous pourrez terminer des niveaux très rapidement avec des raccourcis ou trouver de nouvelles opportunités. Cela n’enlève rien à la linéarité, mais vous serez à tout le moins encouragé à refaire les tableaux du jeu pour expérimenter et découvrir de nouvelles possibilités.
Devriez-vous y jouer ?
Sifu n’est pas un jeu pour tout le monde. C’est difficile, répétitif et affligé de certains problèmes faisant grincer des dents. Malgré tout, ça n’en demeure pas moins un jeu exaltant lorsqu’on a la patience nécessaire pour le maîtriser. Si je ne l’aimais pas du tout au départ, je dois vous avouer qu’après une dizaine d’heures à parfaire mes habiletés, je prends désormais un plaisir fou à refaire des niveaux du jeu en massacrant tout sur mon passage, et ce aussi rapidement qu’un Bruce Lee. Sifu est à considérer si vous désirez un défi et que votre niveau de tolérance est suffisamment élevé pour vous empêcher de briser votre manette !