John Romero et la dangereuse tentation du fanboy

John Romero présentera lundi les détails d'un nouveau jeu de tir à la première personne (FPS) sur lequel il travaillerait depuis un certain temps. Alors qu'aucune autre information n'a encore filtré et qu'Internet bruisse de rumeurs, le moment est idéal pour se rappeler que le bilan des créateurs mythiques de jeux vidéo est parfois peu reluisant.

Mais comment pourrait-on oser enlever nos lunettes roses? Après tout, il s’agit de John Romero!

Le John Romero, celui qui a cofondé id Software, celui qui a travaillé sur certains des jeux les plus influents de tous les temps : Commander Keen, mais surtout Wolfenstein 3D, DOOM (pas ce DOOM, mais plutôt ce DOOM), ou encore Quake. Rien de moins! Et Romero s’est adjoint les services d’Adrian Carmack, sans lien avec le programmeur John Carmack qui travaillait chez id Software, mais plutôt l’un des responsables du design graphique au sein de la même petite équipe de développement.

Messieurs Romero et Carmarck se sont par ailleurs amusés à annoncer leur futur projet en pastichant allègrement la fin de Star Wars : The Force Awakens dans une vidéo largement diffusée mercredi sur le Web.

Depuis, les spéculations abondent et les amateurs de FPS espèrent fortement que ce nouveau jeu, développé chez Night Work Games, une filiale «sombre et violente» de Romero Games, soit à la hauteur. La reprise des travaux conjoints de deux des artisans derrière des bijoux du genre pourrait même être suffisante pour que des amateurs soient tentés de sortir la carte de crédit lorsque le projet prendra réellement forme.

C’était meilleur dans le bon vieux temps

Gare, néanmoins, à ne pas se laisser emporter par la nostalgie. Car ils ont le dos large, ces fameux bons souvenirs d’une époque révolue. Surtout en jeux vidéo. Un peu comme à Hollywood, où les reboots et remakes sont légion, l’industrie du jeu carbure entre autres aux versions HD. Ce sont même les joueurs qui réclament constamment que le jeu avec lequel ils ont grandi il y a 10, 15, voire 20 ans reçoivent ce traitement de faveur. Pas de changements au scénario, peut-être une jouabilité améliorée, mais surtout des textures qui ne remontent pas à l’époque où les seins de Lara Croft pouvaient crever des yeux.

À ce jeu de la fausse idée originale, les participants abondent, les dollars pleuvent, et ces créateurs idolâtrés pour leurs réalisations passées s’adonnent joyeusement à la chose.

Tim Schafer, fondateur de Double Fine Productions.
Tim Schafer, fondateur de Double Fine Productions.

Tim Schafer, surtout connu pour d’excellents jeux tels que Day of the Tentacle, Full Throttle et Grim Fandango capitalise allègrement sur ces vieux succès au sein de son studio actuel, Double Fine. Day of the Tentacle et Grim Fandango ont déjà été remis au goût du jour, et Full Throttle, le troisième jeu auquel Schafer a collaboré du temps qu’il œuvrait chez le défunt LucasArts devrait faire son apparition en 2017.

L’accueil réservé aux deux premiers jeux a été largement positif, mais cela était principalement le fait de joueurs ayant déjà expérimenté les éditions originales et désirant retrouver cette précieuse nostalgie. Quant aux projets plus originaux de Schafer, disons que l’enthousiasme est moins présent.

Le fanatisme atteint parfois des niveaux tels que cela tient quasiment de la ferveur religieuse. Un quart de siècle après être entré chez Konami pour entre autres travailler sur la franchise Castlevania, le créateur Koji Igarashi s’est tourné vers Kickstarter pour faire financer son nouveau projet très largement inspiré des aventures de la famille Belmont.

Une ébauche du jeu Bloodstained : Ritual of the Night.
Une ébauche du jeu Bloodstained : Ritual of the Night.

Résultat? Près de 65 000 personnes ont versé 5,5 millions de dollars US et des poussières pour que Bloodstained : Ritual of the Night devienne réalité. Le jeu sera-t-il bon? Personne ne le sait encore, mais cela ne l’a pas empêché de battre le record de financement pour un jeu sur Kickstarter.

Mettre ses oeillères

L’ajout d’un nom connu en tête d’affiche d’un jeu fait-il perdre tout sens critique? Qu’on se rappelle Planetary Annihilation, héritier spirituel de l’extraordinaire Total Annihilation, et dont l’équipe comptait des anciens de Cavedog, le studio créateur du titre original en 1997. Après une importante campagne de sociofinancement, le produit final était particulièrement décevant.

Le fait qu’une ancienne gloire de l’industrie s’investisse dans la création d’un nouveau jeu devrait allumer des signaux d’avertissement. Ce n’est pas parce que la formule a fonctionné une fois que le succès sera de nouveau au rendez-vous. Surtout lorsqu’une vingtaine d’années s’est écoulée depuis le dernier grand coup de la célébrité en question. Dans l’industrie du jeu vidéo, une vingtaine d’années représente une éternité… voire deux. 

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Voir John Romero reprendre le bâton de pèlerin du FPS est néanmoins encourageant. Ses tentatives de diversifier ses activités en se tournant vers le jeu multijoueur, par exemple, n’ont pas vraiment été couronnées de succès. Et tant mieux si Adrian Carmack embarque lui aussi dans l’aventure. Dieu sait que l’actuelle tentative de ramener DOOM fait craindre le pire. Croisons les doigts, aussi, pour que Romero sache suffisamment s’éloigner de ses créations des années 1990 pour trouver des idées originales, mais sans oublier ses racines. Un délicat jeu d’équilibre qui pardonne rarement.

Ou peut-être travaille-t-il tout simplement sur une refonte de Daikatana. Il est plus que temps, après tout, d’enfin devenir la bitch de Romero (comme le promettait la publicité de l’époque).

Lundi, nous saurons si l’enthousiasme est justifié… ou pas.

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