Lorsqu’il est difficile de programmer pour une console, le constructeur tente de minimiser cette situation auprès du public. Pourtant, ce sont les développeurs qui en subissent les conséquences en devant s’adapter à chaque nouvelle génération, et répartir les coûts de développement suivant plusieurs critères, quitte à lâcher une console pour mieux optimiser lors efforts.
Cette nouvelle génération n’y échappe pas, et c’est maintenant la Xbox One qui s’avère difficile à programmer selon ce que m’ont raconté plusieurs développeurs. Pour l’instant, ils ne peuvent pleinement l’exploiter puisque Microsoft n’a pas encore fourni d’API. C’est la raison pour laquelle la plupart des jeux sont encore en 720p sur Xbox One, et offrent un visuel supérieur en 1 080p sur PlayStation 4.
Si l’on regarde le code d’un jeu vidéo multiplateforme, environ 80% des éléments sont exactement les mêmes entre les différentes versions. C’est l’autre 20% qui fait toute la différence. Il représente le code spécifique à chaque machine. Mais suivant le succès de la console et les perspectives de vente, l’investissement peut différer du tout au tout.
Les consoles difficiles
Chaque génération a connu sa console qui donnait des sueurs froides à l’idée d’y développer des jeux. Dans les années 90, la Saturn, taillée pour la 2D, comportait un second processeur ajouté à la hâte afin de rivaliser la PlayStation, reconnue pour la 3D. La Nintendo 64 était de son côté handicapée par d’autres difficultés, comme chaque canal audio qui utilise 1% des ressources, et la capacité de stockage limitée de ses cartouches (au maximum 64 Mo, contre 640 Mo sur un CD).
Avec une PlayStation facile à programmer et occupant l’essentiel du marché, plusieurs jeux étaient quasi exclusifs, puisque les développeurs ne faisaient pas l’effort de porter tous leurs titres sur les consoles concurrentes.
Pour la génération suivante, la situation a été inversée. Contrairement à la Xbox et la GameCube, la PlayStation 2 était un calvaire à exploiter, mais avec plus de 80% de part de marché, les développeurs n’avaient d’autre choix que d’investir un budget conséquent dans le développement de titres pour celle-ci.
Entre la PlayStation 3 et la Xbox 360, Microsoft a profité de l’errance de Sony dans la conception de sa console. Sans aucune interface de programmation (API) permettant aux développeurs de savoir comment bien exploiter les huit cœurs de la PlayStation 3, ses jeux ont été réalisés avec une résolution plus basse (comme pour Grand Theft Auto IV, dont les images étaient en 620p contre 720p sur Xbox 360) ou comportent plus de bogues. Mais vu le succès de ses ventes, les développeurs ont néanmoins toujours maintenu un bon niveau de qualité.
Une question de budget
Le budget alloué pour développer un titre comprend toujours une part pour le développement spécifique à chaque console. Ce budget est défini selon plusieurs paramètres, mais le principal repose sur le succès de la console, et donc la nécessité d’écouler le plus de titres sur cette plateforme. L’industrie du jeu vidéo doit donc réévaluer perpétuellement ses critères de budget.
Cette nouvelle génération n’y échappe pas, et c’est maintenant la Xbox One qui s’avère difficile à programmer selon ce que m’ont raconté plusieurs développeurs. Si sa puissance brute est inférieure de 30% à la PlaySation 4, elle se rattrape avec 32 Mo de mémoire eSRAM, qui s’avère infiniment plus rapide que la GDDR5. Pour l’instant, les développeurs ne peuvent pleinement l’exploiter puisque Microsoft n’a pas encore fourni d’API. C’est la raison pour laquelle la plupart des jeux sont encore en 720p sur Xbox One, et offrent un visuel supérieur en 1 080p sur PlayStation 4.
Il ne faut cependant pas tirer de conclusion hâtive, les développeurs ont simplement manqué de temps pour les premiers jeux. Les versions PC ont été adaptées dans le cas de Call of Duty : Ghosts et Battlefield 4, sans optimisation particulière. Ils se sont reposés sur la puissance brute des consoles pour faire tourner leurs jeux.
Quel avenir?
Les ventes de consoles sur les deux prochaines années vont être déterminantes. Si la Xbox One fait jeu égal avec la PlayStation 4, ou se vend mieux, les développeurs devront l’exploiter. Alors, sûrement que les jeux comporteront plus de bogues, et une résolution parfois inférieure comme du 900p, mais nous n’aurons pas de différence aussi flagrante qu’avec le dernier Battlefield. Elle sera similaire à ce que nous connaissons sur PlayStation 3 et Xbox 360.
Par contre, si les ventes de la PlayStation 4 continuent d’être bien supérieures à celles de la Xbox One, le futur risque d’être moins réjouissant pour les joueurs. Les développeurs tiers, qui se plaignent déjà du manque de soutien de Microsoft, n’auraient plus beaucoup d’intérêt à développer sur cette console. Les jeux phares multiplateformes seraient toujours là, mais l’investissement sur Xbox One serait alors réduit pour privilégier les versions PlayStation 4 et PC. Si cette hypothèse s’avère juste, son succès reposera alors sur la capacité de Microsoft à lui assurer des exclusivités.