Si Dark Wallet fonctionne tel que promis, ce logiciel pourrait s’avérer être un véritable cauchemar pour les organismes de surveillance financière qui tentent par tous les moyens d’empêcher que le Bitcoin ne devienne la monnaie d’échange des blanchisseurs d’argent et du marché noir.
Le plus aberrant dans toute cette histoire, c’est que ces derniers ne tentent pas de minimiser le risque que leur outil puisse servir aux transactions douteuses – ils en font plutôt la promotion. «C’est carrément un logiciel de blanchiment d’argent», a affirmé Wilson.
Car contrairement à ce que l’on pourrait croire, les transactions de Bitcoins sont loin d’être anonymes. Chaque paiement effectué à l’aide de la populaire cryptomonnaie est enregistré dans une base de données – le registre public, également surnommé Block Chain – qui stocke la totalité des transactions financières passées. Avec cette information, il est donc possible de connaître à quelle adresse (ou dans quel portefeuille) un Bitcoin spécifique a été logé à n’importe quel moment de son histoire, et par conséquent retracer les dépenses de ses anciens propriétaires. À moins que ceux-ci n’aient pris des dispositions afin de masquer leurs activités.
Et c’est justement l’objectif de Cody Wilson et Amir Taaki, les créateurs de Dark Wallet. Le plus aberrant dans toute cette histoire, c’est que ces derniers ne tentent pas de minimiser le risque que leur outil puisse servir aux transactions douteuses – ils en font plutôt la promotion. «C’est carrément un logiciel de blanchiment d’argent», a affirmé Wilson dans le cadre d’un débat sur le sujet en mars dernier.
En dépit de ces provocations, les organismes de surveillance financière sont généralement restés muets au sujet de l’initiative. Par contre, l’agence américaine luttant contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, le Financial Crimes Enforcement Network, a déclaré au magazine Wired qu’elle est «bien consciente des nombreux efforts technologiques émergents visant à renverser la transparence financière» et qu’elle restera «vigilante à l’égard de toute activité pouvant faciliter au blanchiment d’argent et à d’autres délits financiers».
Dark Wallet est le fruit d’une campagne de sociofinancement sur Indiegogo qui s’est déroulée en octobre dernier. Le logiciel parvient à tromper le Block Chain grâce à une technique nommée CoinJoin : chaque fois qu’un utilisateur dépense des Bitcoins, sa transaction est combinée avec celle d’un autre utilisateur de Dark Wallet choisi au hasard. Les deux transactions sont ainsi enregistrées comme une seule dans le registre public, et puisque la négociation de cette transaction bipartie est cryptée, il est pratiquement impossible de déterminer combien de Bitcoins ont été transigés et par quel portefeuille.
Bien que l’application puisse être politiquement incorrecte, elle n’est pas illégale pour autant. Wilson et Taaki défendent leur démarche en implorant le Premier amendement de la Constitution américaine qui garantit la liberté d’expression. Mais Wilson ne peut s’empêcher d’être honnête. «Je veux [que ce soit un] moyen pour permettre des transactions privées sur le marché noir, que ce soit pour des inhalateurs de médicaments sans prescription, du MDMA pour les amateurs de drogues, ou des armes.»
Il ne nie pas non plus que Dark Wallet pourrait provoquer des crimes beaucoup plus odieux, comme la pornographie juvénile, les tueurs à gages et le terrorisme. «Eh bien, oui, de mauvaises choses vont inévitablement se produire sur ces marchés», raconte Wilson. «La liberté est une chose dangereuse.»
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