Le débat qui fait rage au Québec depuis des mois sur les réseaux sociaux tourne autour de ce qui semble être devenu avec la montée d’Internet l’une des questions les plus fondamentales de notre siècle : où se trace la ligne entre la liberté d’expression et la diffamation?
«J’ai raconté une blague. Était-elle de mauvais goût? Oui. Mais les humoristes devraient avoir le droit de faire des blagues, même celles qui blessent.»
Cette affaire repose sur les propos qu’a tenus Mike Ward à l’endroit de Jérémy Gabriel lors d’un spectacle en 2010. Dans son numéro, l’humoriste est revenu sur le battage médiatique qui s’est manifesté autour de l’enfant atteint du syndrome de Treacher Collins dans les années 2000. Ce qui est devenu une forme de campagne d’empathie nationale a permis par la suite à Gabriel de réaliser son rêve de chanter pour le pape. Croyant, à tort, que sa condition lui conférait une espérance de vie réduite, Ward a alors exprimé son grand étonnement d’apprendre que l’enfant était aujourd’hui toujours vie.
Pour le Tribunal des droits de la personne, «les propos tenus par l’humoriste sur le handicap du jeune homme avaient porté atteinte à son droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation». Mike Ward se voit condamné à verser la somme de 35 000$ à Jérémy Gabriel, et 7 000$ à la mère de ce dernier.
L’humoriste a porté la cause en appel, et a promis de porter l’affaire jusqu’en Cour suprême au besoin.
«Certains me décrivent comme un héros de la liberté d’expression, d’autres comme un lâche qui s’est moqué d’un enfant handicapé», explique Mike Ward sur la page de sa campagne de sociofinancement, intitulée Comedy is not a crime. «La vérité repose quelque part entre les deux.»
«J’ai raconté une blague. Était-elle de mauvais goût? Oui. Mais les humoristes devraient avoir le droit de faire des blagues, même celles qui blessent», plaide-t-il. «J’ai déjà dépensé 93 000$ afin de m’assurer de ne pas avoir à payer 42 000$. Je suis soit très mauvais en maths, ou je prends la liberté de parole très au sérieux!»
Au moment d’écrire ces lignes, l’humoriste a amassé plus de 15 000$ sur un objectif de 93 000$. Ward explique que l’argent amassé servira d’abord à payer les honoraires de ses avocats, et que toute somme excédentaire sera mise dans un fonds ayant pour objectif d’aider le prochain humoriste qui devra composer avec une pareille situation.
En annonçant le lancement de sa campagne GoFundMe sur Facebook, Ward a souligné que puisque cette plateforme était anglophone, une autre campagne sera bientôt publiée sur un site de sociofinancement québécois.