Surface, Windows et Xbox One : qu’est-ce qui ne va pas chez Microsoft?

Retour du bouton Démarrer dans Windows 8, échec de la première génération de Surface, revirement de dernière minute avec la politique de la Xbox One, Microsoft a été confrontée depuis un an à de multiples revers.

Pourtant, elle aurait pu faire bien mieux sans une communication défaillante, ou avec des orientations moins radicales causées par une méconnaissance de son public.

Qu’est-ce qui cloche avec la Surface?

Commençons par la Surface : à l’origine trop dispendieuse pour ce qu’elle offrait, équipée de Windows RT incompatible avec Windows alors que ces systèmes d’exploitation portent le même nom, munie d’une interface bâtarde, et proposant un Windows Store avec peu d’applications. Pourtant, Microsoft l’a lancée comme si tout le monde l’attendait tel le messie. De mon côté, j’ai surtout constaté chez Microsoft une communication très en deçà de leurs habitudes, et un manque de compréhension de ses utilisateurs, chose qui s’est répétée avec la Xbox One.

Surface RT de MicrosoftLorsqu’un constructeur s’apprête à lancer un produit, les journalistes le reçoivent généralement quelques semaines avant afin de le tester dans de bonnes conditions. Dans le cas de la Surface, seuls ceux qui avaient de bons contacts chez Microsoft ont eu la chance de se procurer une version d’essai, et celles-ci provenaient de modèles de pré série qui boguaient encore. Finalement, peu avant sa sortie, seulement cinq journalistes américains triés sur le volet l’ont eu en main. Les autres médias ont repris leurs critiques (souvent élogieuses) ou ont publié des articles génériques issus d’agences de presse. Papiers bien sûr fortement inspirés des communiqués de presse de Microsoft, faute de sources.

Sauf que cette pratique est souvent peu payante, et laisse surtout augurer du pire. L’ensemble des journalistes a pu avoir en main quelques Surface – offertes en quantité extrêmement limitée – une à deux semaines après sa mise en marché. C’était un bel objet, mais désespérément vide. Sans Office à son lancement, et avec un magasin très peu achalandé, le public s’est demandé pourquoi il magasinerait une tablette à plus de 600$.

Pour en revenir à Apple et sa façon de fonctionner que Microsoft copie maladroitement, cette dernière ne peut tout simplement pas imposer trop de mesures perçues comme cœrcitives et maintenir le secret. Le public de Microsoft n’est tout simplement pas le même, et a des attentes radicalement différentes, mais qui s’orientent vers l’ouverture et la simplicité, non sans un certain encadrement pour les utilisateurs occasionnels.

Savoir passer la transition numérique

Nous sommes en pleine transition vers le tout numérique et connecté. Apple, qui réussit plutôt bien à ce niveau (en mettant de côté certaines pratiques), l’impose toujours sans laisser vraiment le choix. Si cette politique fonctionne avec Apple pour ses produits, c’est parce que son public recherche cette simplicité idéale. Et elle arrive souvent à point nommé, malgré quelques accidents de parcours.

En supprimant le bouton Démarrer de Windows 8, beaucoup d’utilisateurs familiers avec les précédentes versions du système d’exploitation ont été perdus. Bien sûr, j’ai demandé à des employés de Microsoft ce qu’ils en pensaient, et la conviction qu’ils dégageaient en m’affirmant que tout le monde allait s’y faire m’a laissé perplexe.

Cette attitude se retrouve depuis dans sa communication. La Xbox One en est l’exemple le plus flagrant. Après le revirement de Microsoft, plusieurs voix se sont élevées en reprochant à ceux qui étaient contre l’idée initiale de ne pas avoir laissé l’entreprise tester cette voie. Mais il faut voir aussi comment l’annonce de cette console et la communication autour de sa politique en ligne ont très mal été maîtrisées.

Communications déficientes

Dès les premières rumeurs, il était question de connexion obligatoire et de jeux difficiles, voire impossibles à revendre. Alors que Sony avait déjà communiqué et enfonçait le clou avec sa PlayStation 4, Microsoft entretenait le flou grâce à sa carte magique : la langue de bois.

Voici la réponse que j’ai reçue le 23 mai de la part de Microsoft, lorsque j’ai demandé des clarifications sur les jeux usagés ou prêtés et les rumeurs concernant les frais :

«Nous savons qu’il y a eu de la confusion entourant les jeux usagés sur Xbox One et nous voulions vous offrir un peu de clarification à propos de ce qui a été confirmé exactement. Alors qu’il y a eu plusieurs scénarios potentiels discutés, nous avons seulement confirmé que nous avons conçu la Xbox One pour permettre à nos consommateurs d’échanger et de revendre des jeux au détail. Autrement, nous n’avons pas confirmé de scénarios spécifiques.»

«Une autre clarification à propos de jouer à des jeux chez un ami – si vous décidiez de jouer chez un ami, il n’y a pas de frais pour jouer à ce jeu lorsque que vous utilisez votre profil.»

Xbox OneÀ la lecture de cette réponse évasive, où la compagnie n’affirme pas clairement si des frais seront imposés à la revente de jeux, l’exigence d’être connecté à son profil pour jouer à un jeu sur une autre console nous laisse croire ce sera le cas. De quoi alimenter négativement les rumeurs. Bref, Microsoft a laissé cette situation carrément pourrir, même après l’E3. Ce trouble entretenu a finalement laissé la communication complètement lui échapper. Ce flou et la promesse seulement d’un verre à deux moitiés vides ont été perçus par le public comme une tentative de prise de contrôle totale, avec tous les inconvénients en bonus.

Pourtant, certaines mesures vraiment novatrices et non dépourvues de sens étaient prévues.

En effet, il aurait été possible de créer une liste de 10 amis pouvant jouer en tout temps à vos jeux. Les jeux dématérialisés auraient pu être revendus (une seule fois) sur un marché dédié. Avec un tel système, les joueurs auraient été plus enclins à l’accueillir. Mais au lieu de l’annoncer lors d’un des dévoilements de la console, et d’envoyer des communiqués pour clarifier la situation, cette nouvelle est sortie presque trois semaines après l’E3. Résultat? Elle a été complètement submergée par le tsunami de mécontentements.

Entre ouverture et verrouillage

Pour en revenir à Apple et sa façon de fonctionner que Microsoft copie maladroitement, cette dernière ne peut tout simplement pas imposer trop de mesures perçues comme cœrcitives et maintenir le secret. Le public de Microsoft n’est tout simplement pas le même, et a des attentes radicalement différentes, mais qui s’orientent vers l’ouverture et la simplicité, non sans un certain encadrement pour les utilisateurs occasionnels. Et c’est là le paradoxe Microsoft. Avec Windows, la société a toujours dû maintenir un fragile équilibre entre ouverture et logiciel fermé.

Avec le tout numérique, qui empêche de disposer librement de son jeu, comme sur Steam où ils sont «loués» à vie et impossibles à revendre, le problème est encore plus grand. La communication sur cette transition est donc d’une importance capitale. Le tout numérique a ses avantages, mais les inconvénients restent nombreux. Les solutions réelles qui apportent plus d’ouverture doivent donc être mises en avant afin de contrebalancer ce verrouillage. Garder le secret et dire aux joueurs de magasiner une Xbox 360 plutôt qu’une Xbox One lorsqu’on ne veut pas de la connexion web permanente ne va pas faire vendre des 360, mais des PlayStation 4.

Alors que Microsoft aurait dû laisser le choix sur des mesures techniques, celles-ci ont été imposées. Qui a réellement envie d’une connexion obligatoire ou d’une Kinect qui écoute en permanence ce qui se passe dans la pièce? Surtout à une époque où PRISM laisse penser à toutes les collusions et dérives possibles entre gouvernements et entreprises.

Microsoft n’a finalement pas su réellement trouver l’équilibre entre ouverture et verrouillage. Et à vouloir imposer des solutions trop radicales au public, celui-ci a fini par le lâcher. Il ne faut pas oublier une chose, le public est versatile. Il ne jure pas allégeance à une compagnie, mais achète un produit parce qu’il convient à ses attentes. Un jour il magasinera Sony, puis ira le lendemain vers Samsung. Il convient donc de le rassurer pour ne pas le faire fuir, de savoir quand lui laisser le choix, et mettre en avant l’avantage de ses produits. Chose que Microsoft n’a pas su faire.

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